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Madické Niang, réaliste ou opportuniste

Madické Niang s'est séparé de son mentor Abdoulaye Wade, ne voulant pas être un candidat par défaut du PDS. Copyright de l’image AFP/Getty Images
Image caption Madické Niang s’est séparé de son mentor Abdoulaye Wade, ne voulant pas être un candidat par défaut du PDS.

Tout le parcours politique de Madické Niang est lié au Parti démocratique sénégalais (PDS), la formation de son mentor et ancien président du Sénégal, Abdoulaye Wade.

L’actuel candidat à la présidence a exercé une carrière ministérielle de 10 ans (2002-2012) sous la présidence Wade.

Mais, le moment de la rupture est arrivée en fin 2018 lorsque le candidat de la coalition « Madické 2019 » se sépare avec fracas de son maître en politique, à quelques semaines du scrutin présidentiel.

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L’étudiant Syndicaliste

Madické Niang est né à Saint-Louis (nord) et y passé son enfance, une ville dont il a peut-être hérité le raffinement vestimentaire.

L’étudiant saint-louisien n’a pas traîné une réputation de garçon rangé à l’Université de Dakar, dont il se fera exclure à cause de ses activités syndicales. Il va poursuivre ses études de droit à l’Université d’Abidjan et regagne son pays pour passer avec succès le concours d’entrée au barreau de Dakar et y entamer en 1985 une carrière d’avocat.

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Image caption Madické Niang a été ministre pendant une décennie.

Wade – Niang : 30 ans d’amitié

Me Niang s’est fait distinguer pour la défense d’importantes sociétés privées et de dossiers judiciaires complexes à souhait. Par exemple, les arrestations – dans les années 80 et 90 – de l’opposant Abdoulaye Wade, cité notamment dans une affaire d’assassinat du président de la Cour suprême, Babacar Sèye, à la suite de l’élection présidentielle de 1993. Il réussit, avec d’autres confrères, à mettre son client hors de cause.

La longue amitié – plus de 30 ans – de Madické Niang avec Abdoulaye Wade naît de cette collaboration. L’avocat saint-louisien rejoint le PDS de M. Wade, qui le nomme ministre de l’Habitat en 2002, deux ans après son accession au pouvoir.

Madické Niang enchaîne ensuite les portefeuilles ministériels, pendant une décennie : les Mines et l’Industrie, la Justice, puis les Affaires étrangères. L’ex-patron de la diplomatie sénégalaise, qu’il a dirigée en sa qualité de ministre des Affaires étrangères, d’octobre 2009 à mars 2012

D’importantes réformes judiciaires, dont l’application des peines (notamment réduction des détentions préventives autrefois jugées longues), portent sa signature, selon de nombreux acteurs du secteur.

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Image caption Des responsables du PDS d’Abdoulaye Wade, au premier rang, de g. à d., Karim Wade, Madické Niang, Mamadou Diop Decroix, Oumar Sarr et Ousmane Ngom

Madické Niang, candidat président

Fin 2018, à la surprise générale, il se brouille avec son mentor pour lequel il ne peut y avoir que son fils, Karim, comme candidat du PDS à l’élection présidentielle du 24 février.

M. Niang refuse d’être un candidat de remplacement et se déclare partant, sachant que le dossier de Karim Wade peut être invalidé par le Conseil constitutionnel en raison de sa condamnation en 2015 à six ans de prison.

Karim Wade est ensuite gracié par le chef de l’Etat, Macky Sall – pour détournement de deniers publics.

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Image caption Seul Karim Wade pouvait porter la candidature du PDS, de l’avis d’Abdoulaye Wade, selon certains observateurs.

Les cinq candidats retenus pour la présidentielle du 24 février au Sénégal :

  • BIO
    • El Hadji Issa Sall, 63 ans, est un ingénieur en informatique formé au Sénégal et aux Etats-Unis.
    • Il est l’un des premiers Sénégalais à obtenir un doctorat en informatique (Université George Washington, 1995).
    • M. Sall dirige actuellement l’Université du Sahel, un établissement privé d’enseignement supérieur créé en 1998 à Dakar.
    • Il a travaillé pour de nombreuses sociétés nationales sénégalaises (électricité, télécoms) et américaines, dont la Digital Equipment Corporation (Massachusetts).
    • El Hadji Issa Sall est auteur de plusieurs publications sur les systèmes informatiques et le rôle des technologies de l’information et de la communication dans le renforcement de la démocratie.
    • Sur le plan politique, il a été premier vice-président du Conseil régional de Fatick (1996-2001) et coordonnateur national du Parti de l’unité et du rassemblement, créé en 1998.
    • M. Sall est élu député depuis 2017.
    • Il pratique le karaté et le taekwondo.
    • Il est investi candidat par le PUR.
  • BIO
    • Idrissa Seck, 59 ans, a été Premier ministre et maire de Thiès (ouest).
    • Il dirige actuellement le conseil général de Thiès.
    • Après les violences postélectorales de 1988, M. Seck interrompt sa carrière politique pour se consacrer à ses études à l’Université de Princeton (États-Unis).
    • Considéré comme le dauphin du président Wade, il est mis en cause pour la gestion des "chantiers de Thiès", un ensemble d’infrastructures que l’Etat a construites dans sa ville vers 2004-2006.
    • Idrissa Seck est arrêté le 23 juillet 2005 et passe six mois et demi en prison pour "détournement de fonds publics" et "corruption" présumés.
    • Libéré, il crée "Rewmi" (le pays ou l’Etat en wolof), un parti politique, et affronte Abdoulaye Wade à l’élection présidentielle de 2007.
    • Il arrive deuxième avec 14,86% des voix, derrière Wade (55,90%).
    • n 2012, M. Seck s’appuie sur les dispositions de la Constitution pour dénoncer et juger irrecevable la candidature de Wade aux élections.
    • Il est éliminé au premier tour, n’obtenant que 7 %.
    • Il dirige "Rewmi".
  • BIO
    • Macky Sall, 57 ans, est un ingénieur en géologie formé au Sénégal et en France.
    • Il a dirigé le ministère des Mines et de l’Énergie (de mai 2001 à novembre 2002), avant d’être élu député et vice-président de l’Assemblée nationale (de juin 2001 à novembre 2002).
    • M. Sall a été ministre de l’Intérieur (2003-2004).
    • Membre du Parti démocratique sénégalais (PDS), le parti d’Abdoulaye Wade, il est nommé Premier ministre pendant trois ans (avril-juin 2007), avant de revenir à l’Assemblée nationale en tant que président de l’institution parlementaire.
    • Renvoyé de l’Assemblée nationale en novembre 2008, par la majorité PDS dont il faisait partie, il rejoint l’opposition et est élu président de la République en 2012, battant Wade au 2e tour.
    • Il est investi par la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY), dirigée par son parti, l’Alliance pour la République (APR).
  • BIO
    • Madické Niang, 65 ans, est né à Saint-Louis (nord).
    • Il est avocat et homme politique. Ministre de la Justice dans plusieurs gouvernements, il a également dirigé le ministère des Affaires étrangères (octobre 2009-avril 2012).
    • M. Niang a fait des études de droit à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal) et à Abidjan (Côte d’Ivoire).
    • Proche d’Abdoulaye Wade, il a assuré sa défense dans une affaire d’assassinat, lorsque Babacar Sèye, le chef de la Cour suprême du Sénégal, a été tué en 1993.
    • M. Niang a été élu député en juillet 2017 pour un mandat de cinq ans.
    • Il dirige la coalition "Madické2019".
  • BIO
    • Ousmane Sonko, 44 ans, est fonctionnaire.
    • Né en Casamance (sud), il a fait ses études supérieures à l’Université Gaston-Berger de Saint-Louis (nord), où il a obtenu une maîtrise en droit public (1999).
    • M. Sonko est ensuite entré à l’Ecole nationale d’administration, dont il sort avec un diplôme d’inspecteur des impôts et domaines.
    • Il crée quelques années plus tard le Syndicat des agents des impôts et domaines, qu’il dirige de 2005 à 2012.
    • Il entame ensuite une vive protestation contre le gouvernement de Macky Sall, lui reprochant moult malversations financières et fiscales.
    • Macky Sall le renvoie en août 2016 de la fonction publique à cause des révélations qu’il fait sur plusieurs dossiers économiques et financiers de l’Etat.
    • Président des Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), créé en 2014, il est élu député en juillet 2017.
    • L’ascension exponentielle du leader des Pastef s’internationalise avec les visites qu’il rend aux Sénégalais vivant à l’étranger.
    • Il est investi par son parti.

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Réaliste ou opportuniste

Réalisme ou opportunisme de la part du dissident du PDS ? En tous cas, à un mois du scrutin, la candidature de Karim Wade est jugée irrecevable par le Conseil constitutionnel, ce qui semble confirmer la rupture entre le dissident Madické Niang et son mentor Abdoulaye Wade qui, selon les dires du premier, lui vouait même « une confiance aveugle ».

Sur le plan religieux, il est connu pour son attachement à la très influente confrérie des mourides. Il fait partie de ses millions de fidèles mourides et est considéré par de nombreux observateurs comme un acteur clé des relations du PDS – et de l’ex-régime PDS – avec les dignitaires de ladite confrérie musulmane.

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Image caption Madické Niang, ministre des Affaires étrangères, s’entretient avec Alassane Ouattara, tout nouveau président de la Côte d’Ivoire en avril 2011, à Abidjan.

Madické Niang a été élu député en juillet 2017, sous la bannière PDS, et président du groupe parlementaire « Liberté et démocratie ». Il a démissionné de la présidence de ce groupe à la suite de sa déclaration de candidature au scrutin présidentiel.

Le candidat de la coalition « Madické 2019 », qui se présente comme « le choix qui rassure », promet de soutenir l’indépendance de la justice s’il est élu. Pour ce faire, le Conseil supérieur de la magistrature ne sera plus présidé par le chef de l’Etat, et le ministre chargé de la Justice ne sera plus « membre actif » d’un parti politique, déclare-t-il dans le « projet de société » proposé aux électeurs.

Une promesse rare, pour un candidat à la présidence sénégalaise, celle, faite par M. Niang, de « supprimer les postes de gouverneur », longtemps considérés comme les piliers d’une administration publique réputée pour son efficacité. Il propose de les remplacer par des ministres délégués chargés du développement des régions.

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