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Théâtre : « Mémoire Éternelle », le fruit d’une pensée fraternelle

Des membres de la Compagnie “3 Points” ©DR

Nous avons connus le théâtre, nous avons été initiés à la danse contemporaine et nous sommes sur le point de découvrir la comédie musicale. Pour la première fois, une comédie musicale sera présentée à Bujumbura, en juin prochain. Un spectacle mélangeant musique et théâtre que sont prêt à nous offrir 2 frères passionnés des arts de la scène dont la relation quelque peu fusionnelle a donné naissance à une œuvre d’esprit qui en éblouira plus d’un. Coup d’œil sur cet œuvre mais surtout sur l’aventure que vivent les artistes qui la fabriquent.

 

Deux frères que les passions unissent

« Mémoire Eternelle » est le fruit d’une passion. Plutôt de 2 passions. Celles d’Arnold Ololenyanya Banywerha et Pierre Koko Banywerha. Deux frères natifs de Bukavu (R.D. Congo) que la musique, le théâtre et l’écriture passionnent depuis des années. Et même si leur tempéraments sont à l’opposé (Arnold et extraverti et Pierre est assez réservé).

Ecrire, Arnold s’y met à l’adolescence. Le jeune garçon qu’il est, aime écrire des poèmes. « J’ai commencé à écrire un peu avant 2012. J’étais en 4ème année secondaire et à l’époque j’écrivais pour faire plaisir à mes amis à l’école. Ecrire 2, 3 poèmes à quelques amis. Rien de bien professionnel », nous dit-il. Une passion pour l’écriture qui va plus tard rejoindre sa passion pour le théâtre. Et très vite il se met à écrire des pièces de théâtre. Mais ce ne sont pas là ses seules passions. Il est également musicien dans l’âme. Etre né d’un père guitariste qui vous initie à la musique dès le bas âge y est surement pour quelque chose. Arnold chante, et même très bien à en croire ses amis. Son frère, quant à lui, n’est peut-être pas fan de théâtre mais il partage la même passion pour la musique. Guitariste de talent, Pierre intègre une chorale très jeune (il était en 3ème primaire). Il apprend à jouer de la guitare et devient très vite excellent. A côté de cela, il écrit des chansons. Arnold et lui en ont écrit plusieurs qui selon lui « dorment dans le placard ».

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« Du choc des idées jaillit la lumière »

La proximité des 2 frères et leur passion pour les arts de la scène vont donner naissance en 2012 à une première idée de comédie musicale. Ils vont commencer à écrire les premiers textes mais les circonstances à l’époque ne leur ont pas permis de concrétiser leur rêve. Le projet avorte mais reste enfui quelque part en eux, en attendant que la bonne occasion se présente. En 2013, Arnold et Pierre prennent la direction de Bujumbura pour leurs études universitaires. Ils intègrent tous les 2 une chorale (Saint Thomas D’Aquin chez les frères Dominicains) et Arnold de son côté intègre la troupe « Umushwarara ». Les années passent et l’idée de la comédie musicale refait surface. En 2016, alors qu’ils finissaient leurs études, ils décident de se remettre à travailler sur ce vieux projet et pendant 2 ans, ils tentent de le relancer. « On s’est dit “vu que nous avions de nouveau du temps libre, pourquoi ne pas le relancer”. Alors on s’est mis à travailler, à peaufiner les textes et composer la musique », nous raconte Arnold. Mais cette fois encore, le projet n’aboutit pas, les circonstances n’étaient toujours pas propices.

On est en 2018, il vient d’avoir lieu la 3ème édition du festival Buja Sans Tabou et le théâtre devient un peu plus populaire dans la capitale burundaise. Des troupes comme Yetu Drama et les Enfoirés de Sanoladante réussissent à glaner du public. Les deux frères y voient donc une nouvelle occasion de tenter l’aventure et de mener ce projet jusqu’au bout. Retour à l’écriture et à la composition. Arnold et Pierre travaillent cette pièce qu’ils rêvent de présenter au public. La comédie musicale, qui à l’époque n’a pas encore vraiment de nom, va enfin voir le jour. Ils usent de leurs contacts pour s’attirer les services d’artistes de talent. Ils montent ainsi la compagnie « 3 Points » et se mettent au travail. Chanteurs, musiciens, acteurs, comédiens, metteurs en scène, tous se réunissent et se mettent à travailler pour donner forme à « Mémoire Eternel ».

 

Un processus de création en perpétuelle évolution

L’écriture d’une comédie musicale est un peu différente de l’écriture d’une pièce de théâtre classique. Et cela même dans la construction des textes. « Une pièce de théâtre s’écrit en prose mais pour la comédie musicale, on écrit le texte en rime donc comme des poèmes. Cela à cause du fait qu’il y a de la musique et pour qu’une musique soit belle, elle doit rimer », nous explique Arnold.

Les 2 artistes se sont donc mis à travailler sur des textes cohérents dans la forme et dans le fond. Pendant plusieurs mois ils ont fait en sorte que les textes et les musiques correspondent. Autant la musique doit être capable de ressortir le meilleur du texte, elle doit également être capable de cerner la nature des personnages. Si Pierre a composé la grande partie de la musique, il a su compter sur les connaissances théâtrales de son frère pour que sa musique soit le parfait reflet des personnages qui seront incarnés sur scène. « Lorsque l’on travaille, il arrive souvent que je fasse remarquer l’importance d’un style de musique à la place d’un autre par rapport à la nature du personnage. Cela permettait à Pierre de mieux adapter sa musique. Pareil pour lui en ce qui concerne les textes. Il pouvait me faire remarquer qu’une tournure et meilleure qu’une autre compte tenu de la musique. Et cela ne s’arrête pas. Nous continuons à peaufiner la pièce au fur et à mesure que nous avançons. Il y a des textes que l’on a supprimés et d’autre que l’on a ajouté. C’est aussi ça l’avantage de travailler avec des personnes de de différents domaines. Du reste on ne peut pas tout connaitre. Je dirais même que la comédie musicale sera finie après le spectacle parce qu’il y a des choses que l’on découvre pendant les répétitions. C’est vraiment une création de tout le monde », nous explique Arnold.

 

Un apprentissage de tous les jours

Si l’on s’excite devant le fait que les 2 frères sont en passe d’écrire une page importante des arts de la scène au Burundi, nous n’oublions pas que l’expérience reste nouvelle. Autant pour Arnold et Pierre que pour tout le reste de la compagnie. Aucun de ceux qui travaillent depuis plusieurs mois maintenant ne savaient ce que c’était qu’une comédie musicale. Il a donc fallu apprendre, former, encadrer et bien plus encore. « Il faut savoir que nous avons des personnes venu de tous horizons. Nous avons des musiciens qui ne savaient rien du monde du théâtre, des chanteurs qui n’avaient jalais joué une pièce de leur vie, des acteurs qui n’avaient jamais chanté non plus. Et nous voulions que la pièce soit vraiment parfaite. Qu’elle ne soit pas un à peu près. Donc on a travaillé longtemps pour que chacun apprenne ».

Et lorsque tout le monde est en mode apprentissage, cela donne lieu à des séances de répétition exceptionnelles. Comme nous le raconte Arnold : «  Les membres de la troupe sont vraiment impliqués et l’ambiance lors des répétitions est vraiment géniale. Il y a cette diversité qui fait que chacun a une chose à apporter aux autres. Certains arrivent aujourd’hui à apprendre des choses aux autres et vice-versa. Cela donne une belle ambiance et permet de garder cette unité de groupe. Ainsi nous avançons très bien ».

Arnold et Pierre vivent là une expérience unique et espèrent vraiment que le fruit de leur travail sera apprécié par le public. D’autant plus qu’ils ont fait appel aux talent de mise en scène de Josué Mugisha et de Linca Lyca Mugisha pour cette première comédie musicale qui sera présenté le 15 juin 2019 à l’Institut Français du Burundi.

Ce rêve entretenu depuis 7 années aujourd’hui est sur le point de voir le jour. Et les 2 frères l’attendent avec impatience.

 

Moïse MAZYAMBO

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